A première vue, comme ça, sans réfléchir, en position d’arrêt devant le présentoir d’où se détache Echec à l’organisation, il est permit de se dire que 30 euros, même pour une édition DVD digne de ce nom, ça fait un peu mal au portefeuille. Oui, mais non. Car un vieux schnock comme votre serviteur, avec son côté matérialiste et collectionneur allergique au téléchargement dès qu’il s’agit de ses œuvres fétiches, a toujours préféré manger des pâtes aux œufs pendant quelques jours que de se passer de l’acquisition d’un bon film, d’autant lorsque les suppléments valent leur pesant de douilles. Présentement, il s’agit d’un entretien vidéo d’une dizaine de minutes dans lequel Walter Hill s’exprime sur son pote John Flynn. Cela est déjà en soi un quasi évènement, sachant que Hill, signataire d’un paquet de films incontournables (Driver, Les Guerriers de la nuit, Sans retour, Le Gang des frères James, 48 heures, Extrême préjudice…), n’est guère prolixe d’interviews et que fidèle à sa modestie avérée, reste calé dans sa mission de parler de Flynn, un cinéaste trop oublié dont la plupart des polars et thrillers (surtout Rolling Thunder, Pacte avec un tueur et Justice sauvage, mais oui, celui avec Steven Seagal) sont d’une solidité exemplaire. L’autre supplément consiste en un petit livre de Philippe Garnier, grand spécialiste du cinéma, de la littérature et plus largement de la société nord-américaine, notamment auteur des précieuses pépites que sont Honni soit qui Malibu (sur les écrivains à Hollywood), Maquis (récit d’un voyage à travers les USA au début des 90’s afin de rencontrer des écrivains tels que Larry Brown et Rick Bass) et L’oreille d’un sourd (recueil d’articles portant le nom de ses chroniques parues dans Libération). Garnier signe donc ici Artisan du crime, un texte panégyrique sur John Flynn bourré d’informations passionnantes et de première bourre sur la genèse et le destin d’Echec à l’organisation, bon polar d’une grande époque pour le genre, d’autant qu’il s’agit, cerise sur le gâteux, d’une adaptation (la meilleure avec Le Point de non-retour et Mise à sac) d’un des romans de la « saga » Parker, que le génial Donald Westlake signait Richard Stark.
Le déroulé de cette réunion de patronymes cinq étoiles (Flynn, Duvall, Stark/Westlake, Hill, Garnier…) a forcément eu raison de mes honteuses quelques secondes d’hésitations avant que de quérir fiévreusement le sujet de cette p’tite chronique, ce polar (très) proche cousin, dans son propos et son désenchantement, de Tuez Charley Varrick et copyrighté la même année que Dillinger, Electric Glide in Blue, Serpico, Le Privé, Le Flic ricanant, Magnum Force, Scorpio… On fait pire comme environnement familial.
Un film de John Flynn de 1973. Scénario final de John Flynn, d’après le roman de Richard Stark. La photo est de Bruce Surtees, qui sera un long compagnon de route de Clint Eastwood. La musique est signé Jerry Fielding, autre habitué des productions eastwoodiennes et abonné des équipes de Sam Peckinpah et Michael Winner. Avec Robert Duvall, Joe Don Baker, Karen Black, Robert Ryan et pleins de gens sympas comme Richard Jaeckel, Elisha Cook, Jane Greer, Bill McKinney, Joanna Cassidy, Timothy Carey… arrêtez, stop, c’est trop de bonheur.
Laurent Hellebé
Echec à l’oragnisation (The Outfit)
Réalisation : John Flynn
Scénario : John Flynn d’après un roman de Donald Westlake
Production : Carter Dehaven
Montage : Ralph E. Winters
Photo : Bruce Surtees
Musique : Jerry Fielding
Interprètes: Robert Duval, Karen Black, Joe Don Baker, Jaeckel, Elisha Cook, Jane Greer, …
Origine: Etats-Unis
Editeur : Wild Side Video
Sortie : 30 octobre 2013
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