Bien qu’annoncée constamment et régulièrement, la mort du western n’est toujours pas à l’ordre du jour. Et quand ce n’est pas un film qui a les honneurs du box office, c’est un hommage circonstancié qui vient prouver que le genre connaît toujours un regain d’intérêt. GM Éditions et Carlotta Films sortent deux coffrets, l’un consacré aux cowboys et l’autre aux Indiens, comportant chacun six films et un livre écrit par Louis-Stéphane Ulysse.
Illustré par Alamo, Il était une fois dans l’Ouest, La horde sauvage, Josey Wales hors-la-loi, Tom Horn et True Grit, celui des frères Coen, le premier coffret rend donc hommage aux cowboys des westerns américains, auxquels s’ajoutent ceux qui ont été revus et corrigés par la caméra de Sergio Leone. Et, avec La flèche brisée, La prisonnière du désert, Soldat bleu, Little Big Man, Jeremiah Johnson et Danse avec les loups, le second coffret célèbre les Indiens.
Dans chacun des livres qui les accompagnent, abondamment illustrés, Louis-Stéphane Ulysse retrace les grandes figures historiques, cowboys et Indiens, et les acteurs qui les ont incarnés. Difficile d’être exhaustif avec un sujet aussi vaste. L’auteur a donc choisi de mettre en avant quelques personnages peu connus du grand public. Ainsi, pour les Indiens, Red Wing, James Young Deer, Chief Buffalo Child Long Lance — ayant des origines à la fois noire et indienne, cet acteur milita pour la cause des Indiens, jusqu’au moment où, découvrant qu’il avait des ancêtres noirs, la « bonne société » le bannit de ses soirées —, Iron Eyes Cody — un Italo-Américain qui se fit passer toute sa vie pour un véritable Indien — ou Sacheen Littlefeather, la jeune Indienne qui vint représenter Marlon Brando lors de la cérémonie des Oscars 1973 et refuser la statuette attribuée à l’acteur pour Le Parrain.
Approches tantôt historiques, tantôt cinématographiques, les deux livres sont plutôt une balade dans ce riche univers des légendes de l’Ouest lointain, qui partent à chaque fois de Buffalo Bill et de son cirque, le Wild West Show qui tourna de 1883 à 1913. Ce fut lui qui fit découvrir aux Américains et aux Européens les légendes westerniennes, des outlaws aux shérifs mythiques, des grands chefs indiens emplumés aux Blancs qui prirent le parti des opprimés contre les militaires et pionniers toujours à la recherche d’une nouvelle frontière. La frontière est justement l’un des grands axes du western, que Louis-Stéphane Ulysse approfondit en même temps que les premiers cowboys de l’écran (William Hart, Tom Mix), John Wayne, les cowboys chantants (Gene Autry), John Ford, le Lone Ranger, etc.
Pour paraphraser Théo Angelopoulos, le regard d’Ulysse se pose aussi sur les westerns européens. Tels Winnetou, avec un Indien joué par le Français Pierre Brice, véritable star outre-Rhin, et, bien sûr, la trilogie du dollar de Sergio Leone. Insatiables, on en voudrait plus encore, on aimerait que l’auteur aille encore plus loin dans le détail. Ce qu’il fait, reconnaissons-le, lorsqu’il parle du colonel Carleton et de ses batailles contre les Navajos, ou de Josef Muench, photographe du Grand Canyon, de Monument Valley et de l’Arizona. À propos de ce dernier, Ulysse reprend l’histoire comme quoi Muench aurait jeté une tomate au visage de Hitler, ce qui appartient peut-être plus à la légende qu’à la réalité. Mais l’auteur des Cowboys et des Indiens n’allait quand même pas contredire le grand John Ford en s’en tenant à la réalité.
Jean-Charles Lemeunier
« Une histoire du western » : les deux coffrets — comprenant chacun un livre et six films en DVD — sont édités par GM Éditions et Carlotta Films le 15 mars 2018.