À l’origine du long-métrage d’animation Le Coq de St-Victor, il y a un roman de Johanne Mercier au ton « pagnolesque », avec des personnages truculents et une couleur champêtre, bucolique. Une écriture que le réalisateur Pierre Greco a souhaité enrichir d’un grain de folie typique des « cartoons » de Chuck Jones. D’ailleurs, quand on lui fait remarquer que son métrage animé est un sympathique mélange de film rural « bien de chez nous » à la Tati et d’esprit à la Tex Avery, l’artisan se montre ravi : « C’est exactement ça, mon gars ! Je suis tellement content de t’entendre le dire ! ».
Revue Versus : Ce mélange Pagnol / Chuck Jones, Tati / Tex Avery fonctionne bien ! J’ai tout de suite pensé à une version bucolique et québécoise, un brin plus enfantine évidemment, du « Looney Tunes » Charlie le Coq – sans le côté beau parleur du personnage…
Pierre Greco : C’était l’intention recherchée. D’une façon générale, la grille « cartoon » permet de rendre les enjeux d’une histoire comme celle-là beaucoup plus acceptables. Et aussi d’intensifier le rythme… C’est plus rapide qu’un conte.
Revue Versus : La cible du film, c’est quand même la famille. Mais on sent que vous trouvez le ton juste, un équilibre entre l’humour adulte et l’univers bon enfant.
P. G. : Je suis de la vieille école, des types comme Franquin me fascinent. Lui avait l’habitude de dire : « je fais de la BD pour moi et si les autres aiment, tant mieux. » Là, je me suis fait plaisir, mais en sachant qu’il devait y en avoir pour tout le monde !
Revue Versus : Justement, en parlant de Franquin… Quelles sont vos références, affichées ou non, dans le film ?
P. G. : Goscinny et Uderzo, Pagnol… J’ai emprunté des situations ou expressions aux BD d’Astérix et aussi des regards à Marius. Depuis que la BD est devenue un art à part entière, le « posing » joue une grande importance. La référence ultime dans ce domaine, c’est Franquin.
Revue Versus : Et au niveau des films d’animation ? Du genre de ceux que produisent Pixar et compagnie, mais aussi le Canada, l’Europe…
P. G. : Je dirais que Brad Bird est mon cinéaste contemporain préféré dans l’industrie cinématographique qui nous occupe. Ce que fait John Lasseter est bien sûr exceptionnel. Pixar a clairement ravivé la flamme de l’animation grand public et les studios suivent maintenant le big bang qu’il a créé. Mais quand je travaille, ma référence reste Le Géant de fer (je suis un gros fan de 2D); et aussi Les Incroyables (titré Les Indestructibles en France, NDR). Sinon au niveau canadien, c’est moins facile. Les cartoons sont peu représentés à l’ONF (Office national du film du Canada, NDR). Norman McLaren, c’est super, bien sûr, mais on est déjà plus dans un genre expérimental. Du côté français, Ernest et Célestine, c’est magnifique… Le nerf de la guerre, pour moi, c’est le visuel. Sur Le Coq de St-Victor, je m’occupais du posing, du timing et du travail de l’attitude. Maintenant, c’est au public de dire ce qu’il en pense !
Propos recueillis par Stéphane Ledien
Crédit photo du réalisateur : Daniel Breton
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