Le 19ème festival de Gérardmer s’ouvre avec la présentation du dernier film de Francis Ford Coppola, Twixt. Après L’Homme sans âge et Tétro, Coppola poursuit ses projets personnels, complètement contrôlés artistiquement et budgétairement. Une indépendance déjà éprouvée au moment du Nouvel Hollywood et qu’il veut réactiver. Une intention louable et compréhensible qui n’aboutit ici qu’à un salmigondis formel et narratif parfois embarrassant.
L’écrivain Hall Baltimore (Val Kilmer) en visite dans une petite bourgade pour promouvoir son dernier ouvrage est amené par le sheriff local à s’intéresser à une étrange affaire débutant avec le cadavre d’une jeune fille avec un pieu dans le coeur et qui l’amènera sur les traces du passé refoulé de la localité ainsi que le sien. Voyant là l’occasion de trouver un second souffle littéraire en s’éloignant de récits fantastique de seconde zone, il va s’y immerger jusqu’à en rêver. L’état de rêve sera d’ailleurs l’espace qui lui permettra de développer à la fois son histoire, son enquête sur les évènements apportés par le sheriff bizarre (Bruce Dern) et de faire connaissance avec la jeune V, sorte de fantôme cathartique lui rappelant sa fille décédée. Les séquences de rêve prennent ainsi peu à peu le pas sur le récit et imposent leur structure totalement déconstruites. Seulement, les ruptures de ton s’accompagnent de ruptures esthétiques (un noir et blanc agrémenté de couleurs baveuses, donnant à l’ensemble une laideur assez remarquable) et narratives déconcertantes. A tel point que l’enchaînement des scènes, en privilégiant la formation d’une ambiance onirique, devient rapidement totalement incompréhensible. Impossible de se raccrocher aux personnages introduits, Edgar Allan Poe, une bande de jeunes gothiques et un pasteur psychotique introduisant un peu plus de confusion. La perte de repères aurait pu être intéressante si la mise en scène avait été un minimum soignée, ce qui ne semblait pas être le principal intérêt de Coppola. Ce dernier recherchait apparemment à exorciser la propre mort de son fils dans les mêmes conditions qu’explicitées dans le film et s’est très vite laissé emporté par son émotion alors que le début du métrage laissait au moins présager un film de genre sans prétention mais lorgnant vers une ambiance singulière évoquant Twin Peaks. Au final, Coppola nous livre un hommage involontaire à Jean Rollin à qui on excusait sa ringardise et qui chez l’ancien maître Coppola nous met en peine.
Nicolas Zugasti
Bande-annonce de Twixt de Francis Ford Coppola
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